Co-fondatrice et déléguée générale de HOP, Laetitia Vasseur et toute l’équipe oeuvrent au quotidien pour sensibiliser à l’obsolescence programmée, la combattre et engager les citoyens ainsi que les décideurs politiques et privés autour de bonnes pratiques.

En 3 ans, l’association a déjà fédéré plus de 35 0000 personnes autour de l’économie circulaire ! On en apprend plus aux cotés de Laetitia Vasseur ici 👎

HOP en 3 mots, c’est informer, fédérer et influencer autour de l’obsolescence programmée. Ça se traduit comment au quotidien ?

Au quotidien, c’est très concret : pour mieux informer les consommateurs, nous avons lancé le 1er décembre une plateforme appelée Produits Durables. Sur ce site, on peut trouver toutes les solutions à son échelle pour faire durer ses produits : en achetant durable grâce à des classements de marques, en ayant les bons gestes d’entretien, en réparant et enfin en connaissant ses droits, notamment à la garantie. Nous espérons par ce projet fédérer en sensibilisant le plus de personnes possibles à l’importance de la durabilité des produits. Enfin, nous participons aux travaux du Gouvernement concernant l’allongement de la durée de vie des produits : nous faisons actuellement des propositions en vue d’une loi sur l’économie circulaire à venir en 2019, pour mieux protéger les consommateurs et inciter les producteurs à aller vers des produits plus durables.

Depuis votre création en juillet 2015, parvenez-vous à mesurer les résultats de votre combat contre le «prêt-à-jeter » ?  

Nous avons rencontré de nombreux succès depuis 2015 : tout d’abord, nous avons fédéré plus de 35 000 personnes qui ont affirmé leur souhait d’avoir des produits plus durables et réparables. Ensuite, nous avons obtenu par nos plaintes contre les fabricants d’imprimantes et contre Apple l’ouverture des premières enquêtes en France pour obsolescence programmée par le Procureur de la République. Le délit d’obsolescence programmée pourrait donc être puni pour la première fois, dans l’intérêt des consommateurs et de l’environnement. Nous avons obtenu enfin des avancées de la part du Gouvernement : grâce au plaidoyer actif de HOP, un index de durabilité sera mis en place sur plusieurs catégories de produits dès 2020 pour mieux informer les consommateurs et tirer le marché vers le haut.

Hop Visuel

Quel modèle de société défendez-vous ?

Nous défendons un modèle de société sobre en ressources et en consommation, dans laquelle chacun est libre de consommer mieux et plus durable. Nous croyons en une économie plus sobre centrée sur l’usage (économie de fonctionnalité) plutôt que le volume, la réutilisation plutôt que la production de déchets (économie circulaire), la collaboration plutôt que l’individualisme (économie collaborative). Dans ce modèle idéal, les externalités positives ou négatives provoquées par la fabrication des biens seraient internalisées et reflétées dans le prix des produits, faisant des produits les mieux-disant d’un point de vue environnemental. Les entreprises auraient adapté leur offre à la demande croissante des consommateurs pour des produits qui durent. Chacun pourrait réparer ou faire réparer ses produits aisément et sans trop dépenser, grâce à des informations facilement accessibles et de nombreux réparateurs locaux.

Vous avez pris l’initiative d’écrire à Apple France pour en savoir plus sur l’introduction des puces T2 des ordinateurs MacBook Pro et iMac Pro qui seraient à priori capables de bloquer des appareils si ces derniers ont été réparés par des entreprises non agréées. Du nouveau sur cette affaire ? 

C’est typiquement le genre de pratiques que nous dénonçons, car elles rendent beaucoup plus difficiles de faire durer ses produits. Nous avons reçu une réponse d’Apple, mais il n’en reste pas moins que la puce bloque certaines réparations faites par des professionnels indépendants. Les grandes entreprises sont très sensibles à leur image : plus nous parlons et dénonçons de telles pratiques, moins elles auront tendance à les perpétuer.

Fnac Darty a publié le premier «Baromètre du SAV»[1] en juin 2018 et s’est positionné sur la création d’un indice de réparabilité testé par le LaboFnac sur les ordinateurs portables. Voyez-vous chez Hop un changement de politique des entreprises ces dernières années ?

Oui, tout à fait, on assiste au développement d’un véritable écosystème entrepreneurial de la durabilité, avec des entreprises qui ont saisi qu’elles avaient aussi des intérêts – y compris économiques – à aller vers des produits plus durables. Certaines commencent à percevoir des signaux de la part des consommateurs, qui attendent des produits plus durables et réparables. Comme Fnac Darty qui souhaite en tant que distributeur mieux conseiller les clients sur la réparabilité et la fiabilité des produits. Côté fabricants, de nombreuses startups émergent pour réinventer la manière de produire nos équipements : imprimantes entièrement réparables, smartphone modulable… Il y a de nombreuses autres solutions qui émergent : réparation en ligne, achat reconditionné… Chez HOP, nous soutenons ces initiatives que nous estimons importantes et positives. Nous avons notamment créé le Club de la durabilité pour réunir les entreprises qui vont dans cette direction.

L’enseigne de prêt-à-porter Primark a ouvert en octobre dernier à Toulouse et ne désemplit pas. Un mot sur son expansion en France et sur ce qu’elle reflète de notre société ?

Il est très difficile de promouvoir un changement global vers la durabilité lorsque les prix du neuf sont si bas. Ce mode de consommation renvoie à la quête d’immédiateté et au désir parfois superflu d’acheter ce dont on n’a pas forcément besoin. Heureusement, même l’industrie de la mode se transforme et connaît un réveil écologique. Les Français achètent de moins en moins de vêtements neufs[2], alors que le marché de la seconde main et des produits durables s’envolent.

Après le phénomène Yuka qui scanne l’alimentation des mobinautes détenteurs de l’application, à quand le phénomène Hop pour scanner les produits et ainsi connaitre leur niveau d’obsolescence programmée ?

Bientôt ! Nous venons de lancer notre site inédit Produits Durables qui permet déjà de trouver les produits les plus durables et d’allonger leur durée de vie. C’est la première étape pour mieux distinguer les produits en fonction de leur durabilité. Nous travaillons aussi avec le Gouvernement à l’élaboration d’un indice de réparabilité, pour mieux informer les consommateurs des produits les plus réparables.

Produits Durables . fr Nouveau site HOP

Le collectif est au cœur de votre démarche. Alors, un mot à l’attention de nos lecteurs LMP ?

Bien sûr, ce n’est qu’ensemble que nous pourrons faire bouger les lignes. Alors fédérons-nous et affirmons ensemble que nous voulons des produits qui durent et qui sont réparables, contre l’obsolescence programmée !

Quels sont vos chantiers de 2019 ?

Ils sont nombreux : continuer à sensibiliser par des enquêtes sur les produits, à influencer les pouvoirs publics français et européens pour obtenir des avancées concrètes sur la garantie, les pièces détachées, etc., élargir notre Club de la durabilité pour pousser les entreprises à aller plus loin par leurs engagements, fédérer de plus en plus d’experts, nous développer en région et à l’étranger, etc.

Pour les internautes qui nous lisent et qui n’ont pas encore réalisé leur liste de bonnes résolutions pour la nouvelle année, des résolutions 100% durables à leur suggérer ?

Tout simplement de repenser leur consommation ! D’avoir le réflexe de réparer avant de jeter, de s’interroger sur l’utilité d’un achat au moment de le faire, sur les solutions alternatives au neuf (emprunt, location, don, achat d’occasion…) ainsi que de s’informer sur les marques les plus fiables grâce à notre site produitsdurables.fr

Propos recueillis par Sophie A.

[1] Baromètre SAV Fnac 2018

[2]Les Français achètent de moins en moins de vêtements neufs

Twitter : @laetitiavsr

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